“Le Grand Scandale” de Hubert Gonnet (Le Chemin de Fer, 2025)

Notre premier plus grand plaisir de lecteur réside dans la découverte d’auteurices françaises oubliées. C’est donc tout naturellement que nous nous sommes empressés de nous procurer la seconde vie octroyée au « Grand Scandale » de Hubert Gonnet, par le Chemin de Fer, qui n’est pas à son coup d’essai notez, puisqu’ils nous ont déjà fait rencontrer Denis Belloc et Catherine Guérard, deux immenses talents des lettres françaises.

Inspiré d’un fait divers qui choqua le pays en 1956, le livre se base sur un crime sordide, commis par un curé sur sa maîtresse. Curé peu bavard, dont l’auteur décide de nous faire entendre la voix intérieure, de nous immerger dans son flux de pensées. Mais ceci fait d’une manière très habile, en encapsulant deux récits en un : page de droite, le monologue intérieur du curé, et page de gauche l’enquête, l’entretien avec le juge et tutti quanti.

Petite gymnastique que l’on fait très rapidement sienne, la lecture de cet ouvrage est tout bonnement fascinante. Déjà par l’artisanat éblouissant de son auteur, aussi bien à l’aise dans un Français populaire de son temps que dans des instants qui tutoient une certaine forme de surréalisme, mais aussi dans la manière dont l’introspection vient nourrir la narration des faits et des échanges mis en scène. Au et à mesure que les pages se tournent le personnage du curé prend de l’épaisseur. La masse informe et presque liquide du « monstre » se coagule, et devient celle d’un « homme ». Ne vous y trompez pas, « Le Grand Scandale » est bel et bien un grand livre de la littérature française. Mais c’est aussi un grand livre sur la masculinité, sur sa construction, sur son pouvoir. C’est, sous certains aspects, un grand livre social sur la vie – rurale, ouvrière – dans les années 60. C’est un grand livre sur les tourments intérieurs. « Le Grand Scandale » par sa construction amène à une lecture comme en spirale, celle qui nous fait descendre dans le terrier de lapin que représente l’esprit du curé.

On ne saurait que vous enjoindre à y faire un petit tour également.

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