“Röhner” de Max Baitinger (L’Employé du Moi, 2021)
Va falloir qu’on parle. Pas qu’on ne l’ait pas déjà fait auprès de beaucoup d’entre vous depuis une grosse année, mais là il va falloir que ça se sache, loin, dans les largeurs et les longueurs de l’Hexagone et au-delà, dans toutes les chaumières, dans toutes les esgourdes.
« Röhner » est ce que l’on peut modestement appeler un chef d’oeuvre. N’ayons pas peur des grands mots, après tout il faut bien appeler un chat, un chat. « Röhner » c’est le rythme endiablé de cases d’une efficacité à toute épreuve. C’est aussi une bande dessinée qui peut paraître statique, austère, minimaliste, parcourue de traits faits en guimauve et autres sornettes que notre esprit peut tendre à s’imaginer au survol rapide de ses pages en noir et blanc. « Röhner » est en réalité le mouvement incarné. « Röhner » est en quelque sorte l’histoire d’un énorme pétage de plombs une fois qu’une vieille connaissance de notre héros (ce fameux Röhner) vient littéralement squatter chez lui sans autre forme de procès.
Max Baitinger est un magicien du trait, un inventeur hors pair qui nous propose une idée graphique par double page, le maestro d’une partition écrite à la croche près, silences et syncopes comprises. Derrière un style graphique qui pourrait vous faire passer votre chemin avec son coup de crayon épais, son noir et blanc géométrique, et ses formes quelque fois étranges, se cache notre plus grande leçon esthétique de ces dernières années, et de grandes et belles trouvailles graphiques et narratives. Max fait beaucoup, mais alors vraiment beaucoup, avec très peu. Max trouve un équilibre parfait entre dessin et mots. Max nous éclate la rétine en deux coups de cuillère à pot. Max nous met à terre.
Max Baitinger nous a donné une de nos plus grandes claque en bande dessinée de ses dix dernières années. Il faut lire « Röhner ». Il faut faire découvrir « Röhner ».